Restos du coeur. Au Lion d'Angers, les bénévoles contraints de refuser des bénéficiaires
Depuis le lancement de la campagne d'hiver des Restos du cœur, les bénévoles de l'antenne du Lion d'Angers ont déjà refusé l'aide alimentaire à cinq familles. La faute non pas à une baisse des dons, mais à une hausse du nombre de personnes qui les sollicitent.
5 décembre 2023 à 14h25 par Marie Chevillard
+ 30 % d'inscriptions depuis un an. Au local des Restos du coeur au Lion d'Angers, les conséquences de l'inflation se font directement sentir. Face à cette hausse du nombre de personnes qui toquent à la porte, l'association a été contrainte de changer ses barèmes au niveau national pour l'accès à l'aide alimentaire. "Avant, il y avait un barème d'hiver et un barème d'été, explique Patrice, co-responsable de l'antenne du Lion d'Angers. Compte tenu de la conjoncture actuelle, on a gardé pour l'hiver le barème d'été : ça veut dire que des gens qui y avaient droit l'année dernière, cet hiver ce n'est plus le cas." Résultat : depuis le début de la campagne d'hiver, "on a refusé cinq familles pour l'instant".
Des familles qui n'auront pas le droit à l'aide alimentaire, mais toujours à un accueil chaleureux lors des permanences du jeudi matin. "On est un petit centre, donc on connaît toutes les personnes aidées ici : on les appelle par leur prénom, on leur serre la main quand elles arrivent... C'est très important aussi, parce que certaines personnes sont isolées."
Des familles monoparentales en nombre
Parmi la soixantaine d'inscrits (une centaine pressentie fin décembre), on retrouve beaucoup de familles monoparentales et de retraités, mais aussi des personnes seules, comme Jean-Marc, 56 ans. Il vient depuis un an et demi "pour pouvoir me nourrir déjà, parce que ce n'est pas avec un petit revenu qu'on peut survivre. Et puis, pour la chaleur humaine : je me suis fait des amis ici. Sans les Restos, je serais à la rue." Pourtant, franchir la porte de l'association n'a pas été facile. "Avant d'arriver aux Restos, j'étais très réticent... On ressent de la honte, de l'orgueil, on se dit 'je ne devrais pas en arriver là'. Mais malheureusement, c'est comme ça : faire le premier pas n'est pas facile, mais une fois qu'on y est, on s'y sent bien." Lui continue à bénéficier de cette aide car sa situation n'a pas changé.
Mais en cas de refus, la situation est difficile à vivre, en premier lieu pour les personnes concernées, mais aussi pour les bénévoles. "Ce n'est jamais évident, surtout que même s'ils ont des revenus supérieurs au barème, c'est quand même des revenus de 'misère', soupire Patrice. Mais malheureusement, on n'a pas le choix. Si on doit perdurer, il faut qu'on puisse s'adapter. "
Une fermeture dans 3 ans ?
Au niveau national, le président de l'association a tiré la sonnette d'alarme au mois de septembre : il pointait une éventuelle fermeture d'ici trois ans, si rien n'était fait d'ici là. Un constat partagé sur le terrain par Patrice. "Bien sûr qu'on s'en inquiète, mais on n'est pas surpris non plus, avec cette hausse des inscriptions de plus de 30 % en moyenne. Les Français se mobilisent, il n'y a pas de souci, mais l'Etat doit aussi prendre ses responsabilités. Si demain les Restos du coeur ferment, ça serait triste et ça pourrait créer de sacrés problèmes au niveau de l'Etat."
Pour l'instant, les projets ne manquent pas au Lion d'Angers : après l'inauguration de leurs nouveaux locaux samedi, les travaux du vestiaire de l'association devraient commencer en janvier prochain. Vous pouvez contacter l'antenne au 07 84 83 40 09.