Agriculture. Victoire de Donald Trump, Mercosur, mobilisation du 15 novembre... Arnaud Rousseau a fait le point

Hier, le président de la FNSEA, Arnaud Rousseau, était en déplacement en Mayenne dans une ferme à Courbeveille. En compagnie de ses adhérents, il est allé à la rencontre des agriculteurs pour connaître les difficultés.

12h45 - Modifié : 16h20 par Pierre-Louis Besnier

En déplacement dans une ferme en Mayenne, Arnaud Rousseau confirme la mobilisation le 15 novembre.
En déplacement dans une ferme en Mayenne, Arnaud Rousseau confirme la mobilisation le 15 novembre.
Crédit : Pierre-Louis Besnier

Deux fois par semaine, Arnaud Rousseau se déplace chez les agriculteurs pour prendre la température et connaître leur situation. Lors de ce déplacement, il était question de la colère des agriculteurs, de la victoire de Donald Trump, du Mercosur, de la fièvre cattarhalle ovine, de Lactalis et de la mobilisation du 15 novembre. Entretien avec Arnaud Rousseau, président de la FNSEA. 

 

Arnaud Rousseau, parmi tous les questionnements évoqués, avez-vous reçu de la colère de la part des agriculteurs ?

 

"Oui, tout à fait. Il y a trois points à aborder à ce sujet. D'abord, la dignité et le sens du métier agricole. Quand on parle des retraites agricoles, on n'a toujours pas réglé le problème. Aujourd'hui, c'est le secteur qui a les revenus les plus faibles de tous les Français. Est-ce acceptable lorsqu'on travaille une vie complète pour toucher 1 000 euros ou un peu plus ? La réponse est non. Les députés ont voté une loi à l'unanimité avec des décrets d'application, et aujourd'hui on voudrait que ça rentre en application le 1er janvier 2026. Pour les nouveaux retraités, on nous dit que ce sera peut-être en 2028 rétroactif. La réponse est non. Ensuite, il y a le revenu et la compétitivité. On peut raconter ce qu'on veut mais un agriculteur, c'est un entrepreneur. Et s'il ne peut pas vivre de son métier, tout le reste est non avenu. Si l'agriculteur ne gagne pas sa vie, il arrêtera son activité. Enfin, c'était simplifications et normes. Les agriculteurs n'en peuvent plus de remplir toujours les mêmes papiers où on leur demande toujours la même chose. Enfin, pour en venir à un autre sujet, c'est la victoire de Donald Trump aux élections américaines. C'est un enjeu pour l'agriculture française. Nous verrons maintenant selon quelles modalités il veut protéger le marché américain et comment il gère les distorsions de concurrence".

 

 

On parle de mobilisation du 15 novembre. Est-ce toujours d'actualité ?

 

"Tout à fait. La semaine prochaine, on prévoit une conférence de presse au niveau national pour dire ce que sera le cadre d'engagement. On l'a dit il y a trois semaines, on repartira en action car on considère que sur un certain nombre de sujets, on n'est pas arrivé là où on voulait et les attentes sont grandes. On considère que le changement de logiciel n'est pas encore arrivé. Il y a 48 heures, la ministre madame Genevard a annoncé qu'elle allait mettre en place des choses sur la trésorerie. Ce qui nous intéresse, c'est quand et comment ? On le dit depuis le début : les annonces, c'est bien mais la concrétisation dans les cours de ferme, c'est attendu. Il y a aussi des attentes sur le sanitaire car, hormis la Mayenne, il y a des départements dans lesquels la FCO3 et la FCO8 ont été très dévastatrices. Que dit-on à l'éleveur pour venir l'indemniser du troupeau qui a été parfois décimé ? Donc on sera sur le terrain, on l'annoncera dans quelles conditions et dans quel cadre. Avec les Jeunes agriculteurs, on a toujours été clairs à la FNSEA. D'abord, on dit ce qu'on a obtenu, ce qu'il manque et ce qu'on veut. On ne va pas rentrer dans le cadre du non-respect de la loi, mais je pense que c'est important que les pouvoirs publics entendent que la frustration vécue au printemps génère beaucoup de colère et parfois probablement quelques débordements. Donc il faut aller vite et obtenir les promesses qui nous ont été faites". 

 

En ce qui concerne la fièvre cattarhalle ovine, que faut-il faire ?

 

"Premièrement, il faut enrayer la maladie et donc ça passe par des vaccins. Le Gouvernement en a commandé mais il en manque. Ensuite, il faut indemniser les gens qui ont des pertes. Il faut maintenir les exploitations à flot. Il faut aussi qu'on se mette d'accord sur le cadre européen car la FCO3 est arrivé de Belgique et des Pays-Bas, et on a eu un temps de réaction qui nous a coûté une centaine de milliers de mortalité. Enfin, la Ministre l'a annoncé, et c'est bonne annonce : on aura une conférence sur l'aspect sanitaire cet hiver pour qu'on se mette d'accord sur la doctrine. D'abord on se protège, on alerte sur les mesures qu'on doit mettre au niveau européen et on apporte des secours auprès des agriculteurs en les indemnisant des pertes". 

 

"Des conditions et des exigences de production en Europe parmi les plus élevés de la planète"
Crédit : Pierre-Louis Besnier

Avez-vous eu des échanges avec Lactalis à la suite de l'annonce de l'arrêt de contrat ?

 

"Juste avant la parution de l'annonce, j'ai eu un coup de téléphone de Monsieur Besnier. Il m'a informé de la décision de cesser la collecte 450 millions de litres de lait avec une prise d'effet à partir de l'année prochaine et étalé sur cinq ans. Je lui ai d'abord dit que ce n'était pas une bonne nouvelle qu'on ait moins de production. Monsieur Besnier était mal positionné et m'a expliqué que sa volonté était de mieux payer le lait produit et commercialisé en France. Et que le lait export représentait 1,5 milliards de litres de lait, et qu'aujourd'hui il me parlait que de 450 millions. Je lui ai dit que l'essentiel est qu'aucun producteur ne reste sur le carreau. C'est d'ailleurs l'engagement qu'il a pris. Je pense qu'il y a un choc à prendre conscience que le numéro 1 mondial du lait arrête la collecte dans son propre pays. Ça renvoie l'image d'une forme de déconnexion qui nous interroge. Monsieur Besnier continue de gérer son entreprise mais ce qui compte pour nous, c'est de continuer d'avoir des producteurs qui ont encore envie de faire du lait, qu'ils puissent le faire et qu'ils soient payés du prix du lait". 

 

"Sur un certain nombre de sujets, on n'est pas arrivé là où on voulait et les attentes sont grandes"
Crédit : Pierre-Louis Besnier