En Mayenne, le football rural est en mutation
Arrêt de club ou encore fusion, depuis quelques années le nombre de club ne cesse de baisser. D'après la Ligue de Football Amateur, en l'espace de 5 ans, 4 000 clubs amateurs ont mis la clef sous la porte. Nous nous sommes intéressés aux clubs en milieu rural en Mayenne et à un club Sarthois.
Publié : 14 octobre 2020 à 7h10 - Modifié : 19 octobre 2020 à 10h30 par Alexis Vellayoudom
Samuel Chauvin était l'entraîneur de l'ES Ampoigné
Crédit : Alexis Vellayoudom
Alors que le district de la Mayenne vient d'élire Nicolas Pottier en tant que président, le football Mayennais lui continue d'évoluer. Cet été, le district a enregistré une création de club et une relance pour quatre mise en arrêt partiel ou total et au moins deux fusions. La totalité de ces arrêts de clubs ou fusion concerne des clubs en milieu rural. En cause, la diminution du nombre de licenciés, l'augmentation du nombre de sports proposés dans les communes, mais aussi le manque de moyens, et pour les clubs évoluant en régional, un règlement exigeant.
ES Ampoigné, une belle histoire qui s'est achevée
Parmi les clubs qui ont arrêté cette année, l'ES Ampoigné, dans le Sud-Mayenne. L'année dernière, ce village d'environ 600 habitants, aujourd'hui rattaché à la commune nouvelle du Prée-d'Anjou, comptait une équipe en 4ème division départementale. Relancé en 2018 par une équipe de passionnés et malgré une trésorerie saine, le club a été mis en sommeil cet été, "En deux ans, on a eu un seul départ pour un joueur qui avait la possibilité d'être éducateur dans un autre club et d'avoir sa formation payé donc on n'a pas pu le retenir", explique Samuel Chauvin, 26 ans, était l'entraîneur de l'équipe.
En cause, la difficulté à recruter des joueurs, "ce qui nous a fait mal, c'est le fait de ne pas monter en D3. On n'avait qu'une seule équipe aussi, je sais qu'avec deux équipes, même une en entente, on aurait pu pérenniser le club d'Ampoigné". Une réalité que le confinement n'a pas arrangé. Le nombre de sports proposés à accentuer les difficultés à attirer, mais aussi les équipements des communes rurales, souvent vieux. Samuel Chauvin a d'ailleurs un regard sur le département, "pour schématiser, en Loire-Atlantique, il y a 125 terrains synthétiques. En Mayenne, je ne sais même pas s'il y en 5 actuellement".
À aujourd'hui, la Mayenne compte 6 terrains synthétiques (hors terrain du Stade Lavallois), un septième est en construction pour le club de Laval Bourny et un autre en projet pour la ville de Château-Gontier-sur-Mayenne. La mutation est donc en marche, mais tardive, puisque le projet de ces terrains synthétiques en Mayenne a été lancé en 2016 par Laval Agglo. Les terrains de Saint-Berthevin, L'Huisserie et Laval Bourny seront partagés avec d'autres clubs voisins pendant l'hiver. Ernée s'est doté du sien en 2019 et Craon en 2020, mais il y a encore 3 ans, seules les villes de Changé et de Laval avaient un terrain synthétique dans le département.
Pour éviter de disparaître et rester ambitieux, des clubs fusionnent...
Pour pérenniser le football de village, certains clubs décident de fusionner. C'est le cas de l'Avant-Garde de Laigné et l'Association Sportive de Loigné. Cet été, les deux clubs ont donné naissance à l'Athlétic Laigné-Loigné. Le club compte aujourd'hui trois équipes seniors dont une en régionale 3, "Nous (AS Loigné), c'était une nécessité. Il y a cinq ans, on avait trois équipes, il y a trois ans, on avait deux équipes et la saison dernière, on avait une équipe et demi et on était déjà en entente avec l'équipe de Laigné pour que nos joueurs de B puissent jouer tous les dimanches. C'était pour garder un effectif senior, qu'il y ait des matchs à Loigné, un certains dynamisme. Si on veut avoir une activité au sein même de la commune, on est obligé de fusionner avec un autre club", explique Stéphane Notais, co-président et ex-président de l'AS Loigné.
Pour l'Avant-Garde de Laigné, l'idée était de pérenniser le club, mais aussi d'être en règle pour évoluer en régionale 3, "on nous demande énormément de chose au niveau de la Ligue. Déjà même avec les deux clubs, on n'arrive même pas à fournir en jeune, on est obligé d'aller avec l'Ancienne de Château-Gontier. On a besoin de 26 joueurs pour l'école de foot. Si on n'a pas ces 26 joueurs, on nous refuserait de monter. Plus les arbitres, il faut en permanence trouver de nouveaux arbitres. On en avait trois l'année dernière, cette année, on en a deux. On a l'impression d'être toujours à jour, de faire les efforts pour être bien et enfin de compte, il nous manque toujours un petit plus. On voit Loigné, ils ont des féminines, demain, on nous demandera peut-être d'avoir une équipe féminine pour pouvoir aussi acquérir les labels parce qu'ils demandent aussi des labels", précise Olivier Guillet, co-président et ex-président de l'Avant-Garde de Laigné.
Des points de règlement qui peuvent parfois coûter cher. En Sarthe par exemple, il y a deux ans, l'équipe A de l'US Chantenay-Villedieu en première division est reléguée alors que les joueurs ont arraché le maintien sur le terrain. En cause, un point de règlement sur le nombre de jeunes licenciés à avoir pour évoluer en première division. Le maire, Régis Cerbelle, s'en était alors pris aux instances du football en Sarthe pendant une finale de coupe. On est revenu avec lui sur cet épisode, "c'est encore une fois la preuve de l'attaque de la centralisation à l'encontre des territoires ruraux. Comment peut-on demander à une commune de 850 habitants d'avoir autant d'enfants dans les catégories jeunes que des communes de 3 000, 6 000, 20 000 habitants. Il y a forcément dans une commune de 850 habitants moins de potentiel de jeunes. Il n'y a pas besoin d'avoir fait Polytechnique ou l'ENA pour comprendre ça".
...d'autres s'adaptent
Alors pour faire face à ces difficultés, les bénévoles travaillent davantage. C'est le cas de l'US Entrammes. Il y a 2 ans, à la fusion de la Ligue Atlantique et de la Ligue du Maine, l'ancien Président, Yoann Benoît, avait écrit une lettre où il dénonçait notamment les longs déplacements et les coups financiers et sportifs qu'ils pouvaient entraîner pour les clubs ruraux de régionale 3, " on se savait en retard financièrement sur les gros clubs notamment de la côte. Sportivement, avec le recul, je trouve que les clubs mayennais se défendent pas trop mal. Et en terme d'organisation, on n'avait pas l'habitude de gérer des déplacements de deux ou trois heures", explique Alexandre Mottais, le président du club.
Un petit air de ras le bol contre les instances �xܤ Bien loin du réel plaisir de découvrir de nouvelles équipes en se...
Publiée par US Entrammes sur Mardi 24 juillet 2018
Depuis, le club s’est adapté, "l'ancien président a contacté un sponsor pour essayer d'avoir un minibus pour tous les gros déplacements et derrière, on s'est organisé en terme de sponsoring pour avoir plus d'argent et financer les déplacements [...] on a trouvé quelqu'un qui fait un énorme boulot sponsoring. Notre budget sponsoring il a quadruplé voire quintuplé en deux saisons", précise Alexandre Mottais.
Le district de la Mayenne tente de se faire une place dans cette nouvelle Ligue
Les clubs sont-ils seuls dans ce combat ? Pascal Cornu est membre de la commission compétition et règlement de la Mayenne, selon lui, la fusion entre la Ligue Atlantique et la Ligue du Maine n'a pas rendu service au département de La Mayenne, "on a un peu trop calqué les nouveaux règlements sur ceux de la Ligue Atlantique et maintenant, j'ai l'impression que nos règlements pénalisent les petits clubs ruraux de La Mayenne où il y a 600 habitants, c'est compliqué de rivaliser avec les grosses écuries de la Loire-Altantique ou de la Vendée".
Mais, selon Pascal Cornu, la Ligue est consciente de ce problème, "il y a un effort qui a été fait. La Ligue a modifié l'article 9 qui conditionne la montée en Ligue, autrefois, il conditionnait la montée en division départementale 1 dans chaque département. Auparavant les clubs qui ne remplissaient pas les conditions du nombre d'éducateurs et de jeunes ne pouvaient pas évoluer en division 1, depuis cette année, ça a changé. Un club pourra accéder à la D1 même s'il ne remplit pas tous les critères".
Pour Pascal Cornu, le district de la Mayenne fait au mieux, "L'aide du district a ses limites. On essaye toujours de solliciter les clubs pour envoyer les gens en formation et recruter des jeunes, mais c'est très compliqué".