Anti-mouches, produits phyto, biocides... : quel impact des pesticides sur la santé humaine ?
Une question soulevée par le collectif angevin Vigilance OG2M à l’occasion d’une conférence ce soir à la Pouëze. Le point avec Pierre Lebailly, enseignant-chercheur en santé publique et intervenant de la soirée.
Publié : 12 janvier 2023 à 18h30 par Coralie Juret
Illustration d'un tracteur pulvérisant des produits phytopharmaceutiques dans un champ.
Crédit : bilanol / Envato elements
Vous utilisez peut-être des pesticides chez vous, à la maison, sans le savoir. Le collectif Vigilance OG2M veut sensibiliser sur le lien entre l’exposition à ces produits « qui ont pour vocation de tuer du vivant », et le développement de maladies. Il organise une conférence ce soir à la Pouëze.
« Tout le monde peut être exposé à des pesticides parce que c’est un usage très général », bien que réglementé, détaille Pierre Lebailly, enseignant-chercheur à l’université de Caen et à l’Inserm. Il interviendra lors de la conférence. « Ce sont les produits phytopharmaceutiques utilisés par les agriculteurs, les paysagistes, les voiries ; les biocides, utilisés notamment dans les bâtiments d’élevage pour désinfecter les locaux et contre les rongeurs. Il y a certains médicaments vétérinaires, souvent des insecticides mais aussi quelques fongicides. Et après, les pesticides que tout un chacun peut utiliser dans un usage domestique, sur les animaux domestiques mais aussi pour lutter contre les vilaines mouches dans la maison, les moustiques, les produits de traitement du bois etc. »
Cancers, Parkinson et maladies respiratoires
Des liens ont pu être établis par la communauté scientifique entre l’usage professionnel, avec des expositions importantes, et certaines maladies. Et notamment à l’occasion de deux expertises collectives produites par l’Inserm en 2013 et 2021.
« Il y avait des données assez claires sur le lien entre certains cancers et l’usage des pesticides dans le cadre d’un usage professionnel », rappelle Pierre Lebailly. « Cancers de la prostate, cancers du sang, et certaines maladies neurodégénératives comme Parkinson, respiratoires comme la bronchopneumopathie chronique obstructive qui est assez invalidante. Et puis pour une femme agricultrice ou un homme agriculteur, le fait qu’il y ait des malformations ou des cancers dans sa descendance ».
L’Inserm poursuit ses recherches, notamment pour faciliter la reconnaissance des maladies professionnelles. Pierre Lebailly travaille actuellement sur le cancer du rein et une publication est à venir sur le cancer de l’ovaire. Avec son équipe, il tente aussi de documenter les expositions aux pesticides au contact de la végétation et leur éventuel lien sur la santé, notamment chez les salariés des serres horticoles et des vergers. Ou encore les effets des antiparasitaires utilisés sur les animaux dans les élevages.
Comment se protéger chez soi ?
Si le lien est avéré entre certaines maladies et l’usage des pesticides chez les professionnels, il est moins évident en population générale, rappelle le chercheur, même chez les riverains de parcelles agricoles. Chacun peut pourtant s’interroger sur ses usages.
« Ne pas utiliser des produits chimiques comme ça sans se renseigner sur ce qu’il a dedans », conseille Pierre Lebailly. « Un exemple, les antipoux. On les utilisait sans se poser la question que c’était en grande partie des insecticides, dont certains étaient utilisés depuis longtemps en agriculture et on continuait de les mettre sur la tête de nos enfants. C’était même préconisé par les Inspections académiques. Ces jolis autocollants sur les vitres pour lutter contre les moustiques ou contre les mouches dans les domiciles, c’est souvent avec des molécules qui sont interdites en milieu agricole encore maintenant ». Des produits dont on pourrait finalement se passer, selon le chercheur. En matière d’alimentation, les données montrent aussi un risque de cancer moins important quand on consomme des produits de l’agriculture biologique, souligne Pierre Lebailly.
Conférence sur les pesticides et la santé, ce jeudi 12 janvier à 20h à la Pouëze, théâtre de l’Ardoise. Organisée par Vigilance OG2M avec la participation de l’Inserm et de Phyto-victimes.