"On fera moins de choses, ça sera des arbitrages à faire", Joël Balandraud, maire d'Évron et vice-président de l'AMF

À quelques jours de l'ouverture du 4e édition de son Forum des élus locaux et des acteurs publics, Joël Balandraud, maire d'Évron et vice-président de l'Association des maires de France, est revenu sur la nomination du nouveau gouvernement et les problématiques des maires.

8 octobre 2024 à 9h56 - Modifié : 9 octobre 2024 à 8h51 par Alexis Vellayoudom

Joël Balandrau, président de l'AMF 53 et maire d'Évron

Crédit : Alexis Vellayoudom

Une période charnière pour les maires mayennais. Alors qu'en novembre, les élus de toute la France seront conviés au 106e Congrès des maires à Paris pour rencontrer le nouveau gouvernement et le président de la République, l'association des maires de France de la Mayenne organise ce 12 octobre la 4e édition de son Forum des élus locaux et des acteurs publics, une sorte de petit congrès maires mayennais où 3 500 maires, élus et décideurs publics viendront faire leur marché, s'informer et être conseillés pour réaliser leurs futurs projets. Cette année, 120 exposants sont attendus, une dizaine d'ateliers, conférences et tables rondes sont programmés, de la Petite enfance à la cybersécurité en passant par l'eau et le programme de Zéro artificialisation nette des sols. L'occasion de revenir sur cette séquence politique importante et les sujets brûlants de nos communes avec Joël Balandraud, vice-président de l'AMF France, président d'AMF 53 et maire d'Evron. 


 


Joël Balandraud, la période pour les maires est importante. Dans un contexte financier difficile, un gouvernement a été nommé avec une nouvelle feuille de route. Vous et vos confrères seront reçus les 19, 20 et 21 novembre à Paris pour le 106e Congrès des maires de France. Qu'attendez-vous du gouvernement de Michel Barnier ?


 


"Notre première demande, c'est de la confiance. C'est à un moment donné qu'on retrouve un dialogue de qualité entre le Gouvernement et les élus locaux, c'est ce dont on a le plus manqué. En particulier lorsqu'on se renvoie la balle du déficit public, ça a été affreux (ndlr : Bruno Le Maire, ex-ministre de l'Économie, reprochaient aux collectivités une augmentation rapide des dépenses). Nous, on sait, on a aucun doute là-dessus, que nous ne sommes pas le problème en matière de déficit public. La preuve, il y avait 20 ans, on était à 8 % du déficit du PIB, on est toujours à 8 %. L'État est passé de 70 % à 110 %. Nous ne sommes pas la cause du déficit. Cette annonce du gouvernement comme quoi ce sont les collectivités qui avaient dérapé, factuellement, c'est faux, des économistes sont en train de le dire. C'est qu'en fait, on ne veut pas se faire confiance. On veut se renvoyer la balle des impôts locaux dont on sait pourquoi certains ont augmenté. Il faut qu'on retrouve la confiance et un dialogue de qualité. On est tous responsables et on espère le gouvernement aussi, les solutions seront prises ensemble parce que c'est l'argent des Français".


 


Vous parliez de jours tristes à venir pour les collectivités sur le plan financier ?


 


"Oui. C'est difficile parce que l'Etat est très endetté sur le plan du fonctionnement et comme il a recentralisé, en gros, il a pris les ressources que les particuliers et les entreprises payaient directement aux communes. Il les a prises pour lui et après, il a compensé les communes, mais on sait bien que quand on compense et qu'on n'est pas riche, on finit par ne plus compenser. Je dis toujours que quand quelqu'un vous doit de l'argent, il vaut mieux qu'il ait de l'argent et là, ce n'est pas le cas. On nous a déjà annoncé que les aides sur le Fond Vert vont baisser alors qu'on nous demande de faire la transition énergétique, écologique et le Fond Vert sert à ça, mais on sait déjà qu'il sera amputé d'au moins d'un quart. Ce Fond Vert a été alimenté très largement par l'ancienne taxe de contribution des valeurs ajoutées des entreprises, qu'a été prise aux Communautés de communes. On nous a dit, on vous le rendra sous Fond Vert. Maintenant, on nous l'a enlevée et on ne nous la rendra pas sous forme de Fond Vert". 


 


Moins d'argent pour les communes, ça veut dire moins de projets ? 


 


"Comme les communes ne peuvent pas se surrendettées ou se mettent en déficit sur le long terme, on va faire des économies de fonctionnement le plus indolore possible. On fera des priorisations notamment de faire des prix de cantine qui seront corrects pour tout le monde. On n'a jamais complètement appliqué l'inflation sur le prix de la cantine. Par contre, ça veut dire qu'on fera moins de choses ou à moindre frais et ça sera des arbitrages politiques à faire selon les communes". 


 

 


Avant le Congrès des maires de France, la Mayenne organise le 12 octobre à l'Espace Mayenne son 4e Forum des élus locaux et des acteurs publics. Quel est l'objectif de ce rendez-vous ?


 


"Aujourd'hui, on a des grandes questions qui se posent sur le logement, la rénovation et la construction en général de nos bâtiments publics et leur transition énergétique. Sur ces sujets-là, on a besoin de solutions. Sur ce forum, on est apporteur de solutions et dans le concret. En gros, les élus viennent, ils ont une liste de courses, de questions, de projets. En face, ils auront l'ensemble des acteurs locaux, l'Etat, le Département, la Région, mais aussi les prestataires. Et donc ils pourront construire leurs idées et trouver des réponses à leurs projets. Ça peut permettre de débloquer des situations. Et la thématique de cette année est importante, c'est l'ingénierie territoriale. Qu'est-ce qui est à disposition des élus et des agents pour réussir". 


 


C'est compliqué aujourd'hui pour un maire de faire construire un gymnase ? 


 


"Oui. Aujourd'hui, tout est compliqué. Le monde s'est complexifié et il y a une lenteur administrative. On trouve qu'on atteint des sommets et qu'on est même empêché dans notre capacité d'agir. La façon dont on fait avancer un projet, c'est plus compliqué qu'à une époque. Il y a longtemps, le maire pouvait dire, "tient, j'ai envie de bâtir ça". Il trouvait très vite un architecte, un maître d'ouvrage, il a son terrain et c'est parti. Aujourd'hui, à partir du moment où on a identifié un terrain, il faut qu'il soit bien zoné, qu'il y ait des fouilles archéologiques, préventives, définitives. Il faut que les conditions environnementales d'étude, le sol soit apte, éventuellement qu'il soit compensé. Tout ça, c'est beaucoup d'administratif, c'est beaucoup de travail et avant qu'une pierre ne soit posée, il y a souvent un an et demi, trois ans parfois avant qu'un terrain identifié se transforme en gymnase. Et je ne parle pas de la phase de travaux qui, elle, dure au moins un an et demi". 


 


La complexité aussi, c'est de savoir à qui s'adresser ?


 


"Exactement, le premier manque de nos communes, c'est d'avoir la ressource intellectuelle et technique pour répondre à nos prestataires et monter dans le dossier pour réaliser les choses. On a donc voulu créer un annuaire parce que parfois, les élus, notamment des petites communes, ne savent pas à quelle porte sonner pour trouver des solutions. Or, devant cette complexité engendrée par différentes lois empilées, l'État, les Départements, les Régions et les associations d'élus mettent en place des solutions, de l'aide, de l'ingénierie. Sur ce forum, on aura un débat sur l'ingénierie territoriale donc qu'est-ce qui est à disposition des élus et des communes pour faire. Ça sera un débat avec la préfète de la Mayenne et le directeur général de l'Agence nationale des cohésions des territoires. On a écrit, avec l'Etat et le Département, un annuaire qui permet de référencer toutes les aides et les structures qui sont à disposition des élus. On va se rendre compte qu'elles sont à la fois très nombreuses, mais si elles sont parfois mal connues".


 


Cette année, le Forum des élus locaux et des acteurs publics de la Mayenne soutiendra la lutte contre le cancer du sein dans le cadre d'Octobre Rose.