Craon. 40 manifestants s'opposent à la destruction des barrages sur les rivières la Mayenne et l'Oudon

Une quarantaine de manifestants s'est regroupée hier à Craon, autour d'un mot d'ordre : le maintien des barrages sur la rivière. Leur destruction est contraire aux intérêts écologiques, selon eux. Mais les élus du syndicat du bassin de l'Oudon invoquent également des raisons environnementales... pour les supprimer.

Publié : 4 avril 2024 à 18h54 par Marie Chevillard

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Une quarantaine de manifestants s'est regroupée hier à Craon, contre la destruction des barrages.
Crédit : Marie Chevillard

Armés de leurs pancartes et leur mégaphone, ces manifestants voulaient se faire entendre hier, devant la communauté de communes du Pays de Craon. Ils étaient une quarantaine - des pêcheurs, des riverains, des défenseurs de l'environnement ou du patrimoine - à protester contre la destruction des seuils sur la Mayenne et l'Oudon, c'est-à-dire des petits barrages, des ouvrages pour réhausser la rivière.

"Le syndicat du bassin de l'Oudon en a supprimé plus de 300 ces dernières années, déplore André Boutard, secrétaire de l'association de défense et de sauvegarde de la vallée de l'Oudon. Ces décisions ont des impacts écologiques, puisque chaque fois qu'on supprime un barrage, on abaisse le niveau d'eau et on supprime des hectares de biodiversité." Il cite l'exemple de l'étang de la Guéhardière à Beaulieu-sur-Oudon, où "les poissons et les oiseaux ont disparu, depuis la suppression du barrage".

 

Des barrages utiles... comme ceux des castors

 

Des ouvrages qui auraient aussi, selon André Boutard, un grand rôle pour éviter les inondations et les sécheresses. "Comme un barrage maintient une masse d'eau importante, cette eau pénètre et alimente les nappes phréatiques, qui ensuite vont être utilisées comme eau potable par les habitants de la Mayenne."

Paul-Henry de Vitton, président de l'association des amis de sauvegarde des moulins de la Mayenne, fait l'analogie avec le castor. "Il va faire un barrage pour remonter le niveau et empêcher lui aussi les inondations en hiver. En Mayenne, on a dérégulé nos rivières, on ne maîtrise plus du tout l'eau : on ne peut pas la garder ni en hiver, ni en été, donc on a des assecs."

 

Un face-à-face un peu musclé 

 

Des arguments que réfute le syndicat de l'Oudon, qui avait organisé hier une réunion avec les élus pour expliquer sa politique et ses décisions. L'occasion d'un dialogue un peu musclé avec les manifestants, pendant lequel Louis Michel, le président du syndicat, a rappelé "qu'aucun seuil n'a jamais été détruit sans l'accord de son propriétaire".

L'élu revendique lui aussi une action "contre le réchauffement climatique, pour rafraîchir l'eau. Entre deux barrages, tout compte fait, on a un étang sur une rivière. Certains de nos opposants mettent des poissons d'étang dans la rivière, alors qu'elle n'est faite que pour conduire l'eau. J'ai connu l'Oudon avec plus de poissons morts même quand l'eau était plus haute, parce qu'il n'y avait plus assez d'oxygène pour eux."

Avec les pro et anti-barrages sur la rivière, presque irréconciliables
Crédit : Marie Chevillard

Louis Michel dénonce aussi le mauvais entretien de ces seuils par certains propriétaires, qui aurait conduit à leur effacement naturel. Pour Aurélien Colas, vice-président en charge de la communication au sein du syndicat du bassin de l'Oudon, limiter la gestion de l'eau à la suppression ou au maintien des barrages est réducteur. "Pour faire circuler des poissons et des sédiments, d'autres travaux sont entrepris pour requalibrer les cours d'eau, leur redonner de la sinuosité pour diversifier l'habitat, évaser les berges... Sans parler d'autres programmes mis en place pour le maintien des tallus et des haies."

 

Des conséquences sur l'eau potable ?

 

Mais, au-delà des conséquences environnementales, les opposants à cette suppression des barrages s'inquiètent d'un futur manque d'eau potable. "Avec cette politique, on a des rivières sans eau, regrette Paul-Henry de Vitton. L'hiver, ces rivières ne peuvent pas recharger les nappes, et donc redonner de l'eau en été. 66 % de l'eau consommée par les Mayennais vient des réserves. A l'été 2022, on était presque en limite d'approvisionnement."

Paul-Henry de Vitton "L'été 2022, on était presque en limite d'approvisionnement"
Crédit : Marie Chevillard

Pour les manifestants, tous ces barrages et autres ouvrages permettent aussi de limiter la propagation de la pollution et d'aider les pompiers à lutter contre les incendies, en favorisant les réserves d'eau tout au long de l'année.