Loi Immigration. Cet agriculteur angevin se bat pour faire rester son travailleur sans-papiers
Depuis quelques mois, cet agriculteur angevin emploie une personne en situation irrégulière. Déçu que le Sénat ait supprimé l'article 3, il se bat pour faire rester son employé clandestin.
9 novembre 2023 à 15h29 - Modifié : 9 novembre 2023 à 15h33 par Alexis Vellayoudom
C'était une mesure clivante sur l'immigration, mais que certains employeurs de l'Anjou et de la Mayenne désiraient secrètement. L'article 3 du Projet de Loi Immigration permettait aux personnes sans papiers qui travaillent dans des métiers en tension, d'obtenir un titre de séjour d'un an renouvelable. Pour cela, le travailleur en situation irrégulière devait justifier de trois ans de présence en France et de huit fiches de paie. Mais mercredi, le Sénat, à majorité de droite et centriste, a finalement supprimé cet article, craignant "l'ouverture à une régularisation massive". Une décision que ne comprend pas un agriculteur angevin qui emploie depuis quelques mois un travailleur en situation irrégulière.
"Il faut arrêter l'hypocrisie"
* Pour des raisons d'anonymat, les prénoms et noms ont été modifiés.
Avant d'embaucher ce travailleur en situation irrégulière que nous nommerons Hassane*, Monsieur Dupont explique avoir donné sa chance à quatre salariés français, mais aucun n'a fait l'affaire. Il raconte l'exemple d'une jeune femme de 25 ans, "au bout de 3 semaines, elle considérait que c'était à elle de choisir le travail qu'elle voulait faire et moi de compenser ce qu'elle ne voulait pas faire". "Le rapport de force a changé", dit-il. "Aujourd'hui, ils veulent choisir leurs tâches, leurs salaires, c'est ça qu'on vit".
Par une connaissance, cet agriculteur angevin fait la rencontre d'Hassane, arrivé du continent africain, en situation irrégulière, il l'embauche. "C'est une personne fantastique qui a envie de travailler. Si je le perds, ça sera très compliqué pour l'entreprise", confie l'agriculteur. Il nous l'assure, le salaire, de ce sans papiers, est déclaré, et il paye depuis peu ses cotisations sociales. "Mais je veux qu'il rentre dans les règles, ça ne se ressemble à rien de continuer à maintenir quelqu'un qui fait l'affaire, qu'est heureux, mais qui reste en situation irrégulière parce qu'on a des lois qui hésitent", s'agace l'angevin.
Alors, même si l'article 3 ne concernait pas son secteur d'activité, lui en attendait beaucoup. "A partir du moment où quelqu'un a un boulot ou une promesse du travail et qu'il est motivé, il faut le régulariser, et ça pour tous les métiers", défend l'agriculteur. Avant de conclure, "Ca fait longtemps que dans les vignes ou les vergers, il y a des salariés en situation irrégulière. Il faut arrêter l'hypocrisie".
Une dernière étape à l'Assemblée nationale
Détricoté par les sénateurs de droite et centriste, les articles 3 et 4 se sont transformés en un article 4 bis beaucoup plus restrictif. Le texte parle maintenant de titre de séjour exceptionnel. Pour l'obtenir, les travailleurs en situation irrégulière devront avoir travaillé au moins douze mois sur les deux dernières années dans des "métiers et zones géographiques caractérisés par des difficultés de recrutement". Les demandeurs devront également justifier d'au moins trois ans de résidence en France.
Pour être validé, l'article devra être adopté par les députés lorsque le projet de loi entrera au débat à l'Assemblée nationale le 11 décembre 2023.