Réforme des retraites : ceux qui ne pourront pas aller jusqu’à 64 ans

Cassés, usés par des métiers pénibles ou fatigants, nombreux sont ceux qui ne s’imaginent pas capables de tenir deux ans de plus jusqu’à la retraite en cas de réforme. Témoignages dans le cortège segréen de ce mardi 7 février.

8 février 2023 à 0h53 par Coralie Juret

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Pancarte sur la manifestation de Segré contre la réforme des retraites, le 7 février 2023.
Crédit : Coralie Juret

Travailler jusqu’à 64 ans, c’est encore et toujours non pour 500 Segréens et 8000 Lavallois qui ont défilé ce mardi 7 février contre la réforme des retraites. Ils veulent pouvoir profiter de leurs vieux jours et pointent la pénibilité de leurs métiers. Ouvriers à l’usine, ancien facteur, pompier ou soignantes d’EHPAD, ils nous ont expliqué pourquoi.

 

Douleurs physiques…

 

Didier travaille chez Elivia, un abattoir au Lion d’Angers. A 50 ans, il a déjà été reclassé sur un autre poste. « Le travail à la chaine, c’est fatigant pour le dos, les poignets et les épaules. Moi c’est hernie cervicale et lombaires. Continuer jusqu’à 64 ans c’est pas possible, pour moi 60 ans c’est assez. Et tant pis pour la retraite ».  Impossible aussi pour Nelly, bientôt 50 ans, d’aller jusqu’à 60 ans « avec les gestes répétitifs. Douleurs aux cervicales, aux épaules, canal carpien, ça s’enchaîne. Déjà à 60 ans on va être cassé », lance cette salariée syndiquée (CGT) de Paulstra Hutchinson, sous-traitant automobile du groupe Total.

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500 personnes ont défilé à Segré contre la réforme des retraites le 7 février 2023.
Crédit : Coralie Juret

Pour Nathalie et Magali, la quarantaine, la pénibilité ce sont « les horaires, la charge de travail, les contraintes familiales, physiquement, moralement et psychologiquement ». Elles travaillent en EHPAD à Vern d’Anjou et elles ont déjà mal au dos, aux épaules, aux bras. « Notre métier il faut le faire vraiment avec cœur, 62 ans quand on porte des résidents qui sont de plus en plus dépendants c’est pas possible », plaide l’une d’elle. Il faudrait un régime spécial pour reconnaitre les pénibilités de certains métiers selon elle : « il faut vraiment remettre les choses à plat. Certains partent très tôt, d’autres très tard ».

 

… et régimes spéciaux

 

Les facteurs justement, pouvaient partir à 55 ans. Mais c’était avant : « aujourd'hui ils auraient une retraite de misère, donc ils travaillent jusqu’à minimum 60 ans et ils sont cassés » détaille Luc, cadre à la Poste, ancien facteur et représentant syndical UNSA. « Ils travaillent 6/7 jours, font des tournées de plus en plus longues, doivent distribuer des paquets de plus en plus lourds, jusqu’à 35 kg. 60 ans c’est pas possible, même avec un vélo électrique ». Chez les sapeurs-pompiers professionnels, l’âge de départ passerait de 57 à 59 ans. « Ça veut dire un état de santé super en forme pour porter secours et être efficace dans nos missions. Il y a une usure par le fait de se lever la nuit quand le bip sonne, le cœur qui passe de 30 pulsations la nuit à 120 d’un seul coup c’est compliqué », résume Sébastien, délégué UNSA. « Quand j’ai signé en 2004, si on partait en retraite à 55 ans c’est pas pour rien » ajoute-t-il. Les pompiers ont une espérance de vie inférieure de 7 ans à la moyenne nationale, selon une proposition de loi de 2017.

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Pancarte sur la manifestation contre la réforme des retraites le 7 février 2023 à Segré.
Crédit : Coralie Juret

Prendre en compte la pénibilité et les choix de chacun, « il y en a qui ont envie de partir plus tard » souligne Damien, surveillant d’internat, la question fait l’unanimité. Quitte à remettre en place des régimes spéciaux. « On les critique sans savoir », regrette Luc l’ancien facteur. « On a l’impression que c’est des avantages énormes, un facteur aujourd’hui part avec une retraite de 1300-1400€ ».

Une quatrième mobilisation contre le texte en examen à l’Assemblée depuis ce lundi 6 février est déjà prévue samedi 11 à 10h à Segré (place du Port) et à 14h à Laval (square de Boston).