En Mayenne. Les élèves ne parlant pas français ont désormais leurs cours spécifiques
Depuis le début de la rentrée scolaire 2024, les élèves allophones peuvent bénéficier du dispositif UPE2A, un temps de classe qui leur est consacré pour l'apprentissage du français.
Publié : 8 novembre 2024 à 10h30 - Modifié : 8 novembre 2024 à 10h35 par Alexis Vellayoudom
En Mayenne, les élèves qui parlent peu le français ont désormais un temps de classe spécifique. Depuis la rentrée scolaire, le dispositif UPE2A a été mis en place au collège Jacques Monod et au lycée Robert Buron. Cette unité pédagogique pour les élèves allophones répond à une forte demande sur le département où une centaine d'élèves en bénéficie, principalement à Laval et Mayenne.
"Ça permet aux élèves de parler sans avoir de peur de faire des erreurs"
Pas plus tard que l'année dernière, les enseignants devaient encore se déplacer dans tout le département pour aller aider les élèves allophones dans l'apprentissage du Français. Aujourd'hui, avec la création de cette UPE2A, plus besoin de voiture, ce sont désormais les élèves qui sont regroupés sur des pôles. Le collège Jacques Monod accueille, par exemple, une trentaine d'élèves qui peuvent aussi venir des collèges Emmanuel de Martonne ou Jules Renard pour participer à ces temps spécifiques ajoutés en plus des cours avec leur classe traditionnelle. Chaque mois, une Commission départementale étudie les dossiers d'élèves allophones et évalue leur niveau en français pour ensuite les dispatcher, en fonction de leur niveau, dans l'un des 8 modules.
"C'est sur une période qui n'est pas définie en amont. Ce sont des modules de 3h, souvent placés le matin, mais un élève peut bénéficier d'un ou deux modules donc ça peut être 3h, 6h, voire plus s'ils font des mathématiques ou de l'histoire-géographie. Ils peuvent passer d'un module à un autre pour progresser. Ça peut représenter un petit mi-temps", explique Claire Jakuboswki, inspectrice, en charge de l'affection des élèves et de l'orientation en Mayenne. Une structuration de l'apprentissage qui facilite aussi le travail des enseignants. Depuis 15 ans, Catherine Pons sillonnait la Mayenne. La mise à dispositon de deux salles, rénovées par le Conseil départemental qui subventionne le dispositif, au collège Jacques Monod et au Lycée Robert Buron facile le travail de l'enseignante référente. "Ça permet aux élèves de prendre confiance, parler sans avoir peur de faire des erreurs parce que parler dans une classe de francophone, ça fait peur. Même quand ils comprennent, ils ne s'expriment pas". Les élèves peuvent aussi profiter de livres et de matériels scolaires donnés par les enseignes Cultura et Leclerc.
"On leur apprend le français de langue courante pour se débrouiller"
Ce matin, le cours est plein, c'est le cas d'ailleurs de la totalité des modules. "On est à flux tendu", précise Brigitte Lacoste, directrice académique de la Mayenne. Parmi les élèves présents des Somaliens, Jordaniens, Syriens, Afghans, Roumains ou Guinéens comme Abou. "J'aimerai devenir électricien", explique l'élève de 14 ans dans un français presque parfait. La quinzaine d'élèves suit un cours de niveau 2. "On leur apprend le français de langue courante pour se débrouiller, mais surtout le Français de scolarisation. Le Français des mathématiques, d'histoire-géographie. On étudie des oeuvres littéraires", détaille Catherine Pons. Face à eux, des élèves souvent polyglottes, "je parle arabe, un tout petit peu anglais, italien et le français", énumère Bayane, arrivée de Syrie. Les enseignants s'amusent ce mélange culturel. "On fait de la grammaire dans les autres langues. Ça leur permet de comprendre la forme négative par exemple".
Mais ce choc culturel peut quelques fois entraîner quelques problèmes. "Quelques fois, il y a un petit blocage au moment où ils commencent à bien maîtriser le Français et qu'ils ont peur de devenir français quelque part. Il faut leur dire "tu as les deux, tu n'as pas besoin de laisser une langue pour l'autre", confie l'enseignante d'anglais. Leurs parcours d'écorchés souvent liés à des raisons économiques et géopolitiques peut faire ressurgir quelques traumatismes. La principale adjointe Barka Benfodda utilise parfois l'arabe pour les rassurer : "Le but, c'est de les rassurer, pas de se substituer aux parents, mais d'être un soutien administratif, des choses comme ça". Selon les progrès, les élèves peuvent sortir du dispositif. "L'idée étant qu'à un moment donné, il réintègre à 100 % sa classe pour continuer à progresser avec ses camarades et ses professeurs", rappelle l'académie. Ils ne sont pas pour autant lâchés dans la nature. Chaque élève qui sort du dispositif peut ensuite bénéficier de 2h de cours de français par jour.