JO de Paris 2024. Francis Guilleux, l'arbitre olympique de Coudray
Natif de Coudray, Francis Guilleux a été arbitre olympique de marche athlétique. Le Mayennais a participé à huit Jeux olympiques dont ceux de Berlin en 1936 pendant le régime Nazi. Jean-Paul Bonsergent tente de faire perdurer cette histoire.
15 juillet 2024 à 12h34 - Modifié : 16 juillet 2024 à 8h50 par Alexis Vellayoudom
C'est un homme qui a eu mille vies comme s'amusait à titrer dans le Haut-Anjou Jean-Paul Bonsergent lorsqu'il était encore correspondant pour l'hebdomadaire. Aujourd'hui, ce passeur d'histoire, comme il se décrit, a ressorti ses vieux cartons pour raconter le fabuleux destin de Francis Guilleux. Ce Mayennais, né à Coudray, a participé à plusieurs Jeux olympiques en tant qu'arbitre international de marche athlétique. Jean-Paul milite pour que la ville fasse vivre la mémoire cette légende coudréenne.
Un marcheur aguerri
C'est à la bibliothèque de Coudray que nous retrouvons l'ancien élu. Sur le pas de l'entrée, Jean-Paul Bonsergent se tourne vers la ville et pointe son doigt en direction de la maison qui fait l'angle entre la rue de Château-Gontier et la rue du Bac de Ménil. "De là où nous sommes, nous avons sa maison. Elle a été un peu transformée depuis, mais son jardin, la salle de son ex-musée sont encore présents. La glycine, qu'est énorme, qu'a un tronc noueud, c'est lui qui l'avait plantée. C'est peut-être le seul souvenir qu'il a laissé sur Coudray", raconte Jean-Paul Bonsergent.
En réalité, Francis Guilleux a vu le jour en 1888 dans la petite ferme familiale, installée sur le Route de Daon. À l'époque, les voitures se font rares, le jeune garçon, à l'âme sportive, fait tous les jours le chemin vers Coudray. Dans les écrits qu'il a laissés, Jean-Paul Bonsergent a tenté de déchiffrer l'état d'esprit du jeune coudréen, "il avait l'âme sportive. Est-ce que c'est parce que son frère était légèrement handicapé. Il pouvait difficilement se déplacer que lui, le pouvant, il a voulu éviter ce qui est arrivé à son frère. Alors ce qui fait, qu'il faisait 3 km à pied pour venir à l'école de Coudray".
Les Jeux olympiques de Berlin en 1936
À la ferme, les époux Guilleux reçoivent du monde, notamment des cheminots, "il aimait beaucoup rencontrer ces gens qui marchaient. Lui a beaucoup marché" . Une passion qu'il va devoir mettre entre parenthèse après le début de la Première Guerre mondiale en 1914 où il est incorporé dans le 1er Régiment des Chasseurs. De retour de la Grande Guerre, Francis Guilleux poursuit son aventure. "En 1922, il s'est associé à la Société des Marcheurs athlétiques à Paris. Il en a fait une grande association", explique Jean-Paul. Lui-même adepte de cette marche tonique, Francis Guilleux bat des records de France et remportent des titres de champion de France. Certains anciens de Coudray ont légué des souvenirs. "Il n'avait pas de voiture. Il venait en train à Sablé avec son épouse et de Sablé, il venait à pied à Coudray. Pour l'anecdote, lorsqu'un jour, il suivait une carriole, il avait presque dépassé le cheval en montant la cote entre Coudray et Château-Gontier. Les gens se souviennent de ce petit monsieur", se remémore le passionné d'histoire.
La consécration arrive en lorsqu'il est nommé capitaine de l'équipe de France de marche athlétique en 1924 pour les Jeux olympiques de Paris. "J'ai assisté à toutes les péripéties de l'entraînement des marcheurs étrangers et aux trois épreuves de marche, les deux séries de 10 km et la finale", écrit-il dans ses mémoires. Il va d'ailleurs publier en 1929, un livre "très technique" sur la marche, créé le journal, L'Echo des Marcheurs français. S'en suit une carrière d'arbitre international qui débute en 1936 aux Jeux olympiques de Berlin, "devant le régime Nazi", lance Jean-Paul Bonsergent. Une nouvelle fois, la guerre va mettre en pause son ascension. Pendant la Seconde Guerre mondiale, Francis Guilleux intégrera la résistance parisienne et le groupe Libération-Nord.
Meilleur ouvrier de France et résistant
Après la victoire des Alliés, il revient à la marche athlétique. Il enchaîne avec les Jeux olympiques de Londres (1948), Helsinski (1952), Melbourne (1956), puis Rome (1960), "il avait conservé ses médailles sur ces épisodes d'arbitrage international", précise Jean-Paul. En parallèle, le Coudréen réussit tout ce qu'il entreprend. Compagnon du Devoir, il parcourt le monde en poursuivant sa passion pour la marche. En 1939, il devient Meilleur ouvrier de France, sellier-arnacheur, puis travaille pour l'entreprise Hermès.
En 1968, la millième vie de Francis Guilleux arrive à son terme. L'athlète est enterré, chez lui, à Coudray. "Ce qui est intéressant, c'est qu'avec tout ce qu'il avait vécu. Sa vie internationale, ses compétences d'artisan, et bien il aimait Coudray. Il aimait son Coudray. Il revenait souvent en vacances à Coudray. Il prêtait sa maison à ses amis". À son décès, sans descendance directe, son héritage, ses médailles s'éparpillent, "hélas, son souhait qu'il avait de donner tous ses objets, ses collections, ses médailles sportives et militaires, n'a pas abouti avec la municipalité", précise l'élu. Aujourd'hui, Jean-Paul Bonsergent souhaite conserver la maison de Francis Guilleux, mais aussi lui dédier quelque chose qui pourrait prendre la forme d'un musée, un panneau pour se souvenir de cet homme qui, comme il se plaît à le dire, était "exceptionnel, pour un petit village comme Coudray".